Pourquoi la communication avec les patients est-elle si cruciale en association santé ?

Dans le secteur associatif de la santé, une grande part des missions repose sur la relation avec les patients : écoute, information, accompagnement, plaidoyer... Or, selon le Baromètre Santé Publique France 2021, 70 % des patients déclarent avoir au moins une fois eu des difficultés à comprendre une information de santé. Le défi de la clarté concerne donc tout particulièrement les associations, qui doivent transmettre des messages compréhensibles, respectueux et adaptés à des profils très diversifiés (source : Santé Publique France).

Communiquer avec les patients ne se limite pas à diffuser de l’information : il s’agit aussi de créer un lien, de rassurer, de permettre l’autonomie, d’éviter les quiproquos. Ceci est d’autant plus important que l’association n’a pas les mêmes leviers institutionnels qu’un établissement de santé. Elle doit souvent composer avec des contraintes de moyens et de temps.

À l’ère de l’infobésité et de la dématérialisation, 60 % des patients cherchent des renseignements sur Internet avant de contacter une association ou un professionnel (source : CREDOC, 2022). La qualité, l’adaptabilité et la humanité de votre communication deviennent alors des enjeux majeurs pour instaurer une relation de confiance dès le premier contact.

Définir ses cibles et s’adapter aux besoins spécifiques des patients

Dans toute démarche de communication, une question fondamentale doit précéder toute action : « À qui s’adresse-t-on, et quels sont ses besoins ? ». Dans les associations santé, le public patient est rarement homogène. Il peut s’agir de patients chroniques, de proches aidants, de personnes nouvellement diagnostiquées, de familles, parfois de mineurs... Chacun a ses attentes, ses peurs, son niveau de connaissance de la maladie ou du système de santé.

  • Identifier précisément ses cibles : adoptez une segmentation simple selon l’âge, le contexte de vie, le niveau de littératie en santé (plus d’1 adulte sur 3 a des difficultés à comprendre et utiliser une information médicale en France : source Santé publique France, 2019), la langue, le type de pathologie, etc.
  • Adapter le canal de communication : Les moins de 30 ans privilégient le digital, tandis que des brochures papier restent très efficaces pour les seniors ou les personnes éloignées du numérique (source : Enquête INSEE 2021 sur l’illectronisme).
  • Prendre en compte le vécu : L’écoute de patients-experts aide à éviter les projections, et à utiliser le bon vocabulaire, ni trop médical, ni infantilisant.

Petit focus : la littératie en santé

La littératie désigne la capacité à comprendre, traiter et utiliser des informations pour prendre des décisions concernant sa santé. D’après l’étude ELFE (Étude Longitudinale Française depuis l’Enfance), un Français sur deux n’aurait pas le niveau de littératie suffisant pour comprendre une notice de médicament complexe. Adaptez donc la forme et le fond de vos messages, pour être inclusif, et évitez les sigles ou expressions médicales non expliquées.

Choisir les bons outils et canaux pour toucher efficacement les patients

La diversité des patients oblige à être multicanal, mais sans s’éparpiller. Voici quelques pistes éprouvées dans le milieu associatif santé :

  1. Les supports écrits : Brochures, affiches, guides… Privilégiez des textes courts, des visuels explicites, des schémas et des infographies (92 % des personnes assimilent mieux une information illustrée, source : INSERM).
  2. Le digital : Site web accessible (niveaux RGAA ou WCAG), newsletters, réseaux sociaux ciblés. En 2022, 75% des 18-49 ans préféraient suivre une association sur Facebook ou Instagram plutôt que par mail (Harris Interactive, 2022).
  3. L’accueil direct : Stands, permanences d’écoute, groupes de parole. L’humain reste incontournable : 82 % des patients font davantage confiance à une association qui organise au moins un moment d’échange en présentiel chaque année (France Assos Santé, 2021).
  4. La vidéo et l’audio : Vidéos explicatives, webinaires, podcasts. Ces formats sont de plus en plus plébiscités, notamment par les jeunes malades et les proches éloignés géographiquement.

Structurer sa communication pour gagner en impact et en cohérence

Pour être efficace, la communication auprès des patients doit reposer sur une certaine organisation, même si elle reste artisanale. Voici quelques fondamentaux issus de retours de terrain associatif :

  • Établir un calendrier éditorial simplifié : Prévoyez les sujets phares selon la temporalité des événements (semaine de la prévention, journée mondiale, date clé de l’association).
  • Co-construire avec les patients : Impliquez-les à toutes les étapes – relecture de supports, bêta-tests de newsletters, co-analyse des retours obtenus. Leur regard est irremplaçable pour garantir la pertinence de vos messages.
  • Favoriser la concertation interne : Réunissez régulièrement bénévoles, salariés, usagers et partenaires pour mesurer les besoins, ajuster les messages, partager les écueils.
  • S’assurer de la validité des messages : Mettez à jour textes et fiches à chaque évolution réglementaire ou thérapeutique ; appuyez-vous sur des informations fiables (HAS, Santé publique France, ANSM, etc.).

Quelques bonnes pratiques concrètes pour une communication associative efficace

Voici des outils, méthodes et astuces adoptés par de nombreuses associations pour booster la qualité et l'efficacité de leurs communications patient :

  • Utiliser la méthode FALC (Facile à lire et à comprendre) : Le FALC permet de rendre les messages accessibles aux personnes en situation de handicap intellectuel mais aussi à toute personne ayant des difficultés de lecture (source : Unapei). On privilégie des phrases courtes, des mots simples, des pictos, une mise en page aérée.
  • Réaliser un kit d’accueil patient : Ce petit dossier, remis lors du premier contact, rassemble l’essentiel : coordonnées, explications de la pathologie, droits, sources d’aides, points de vigilance.
  • Favoriser les retours d’expérience et témoignages : Publier régulièrement la parole de patients, recueillie avec leur accord, valorise la confiance, l’authenticité et la force du vécu.
  • Prévoir un répertoire de contacts utiles : Il rassure de nombreuses familles, oriente vers le bon interlocuteur, et montre la capacité de l’association à accompagner sur la durée.
  • Organiser des ateliers de communication patients : Ateliers d’expression, groupes d’éducation thérapeutique, séances de « questions-réponses » sur Facebook Live, cela permet d’identifier les points d’incompréhension, de former les patients et de renforcer la proximité.
  • Mettre en avant la confidentialité : Formulez systématiquement un rappel sur la confidentialité des échanges, la gestion des données, le respect des parcours.
  • Rédiger une charte de communication : Quelques pages pour poser les valeurs, les principes d’écoute et de bienveillance, les modalités de modération des espaces d’expression.

Zoom : la communication en situation de crise

Lorsqu’une association est confrontée à une crise (retard de remboursement, retrait d’un médicament, polémique médiatique…), la transparence et la réactivité sont décisives. Les associations qui informent rapidement leurs patients sur les réseaux sociaux, via des points de situation clairs, obtiennent 30 % moins d’appels entrants paniqués que celles qui tardent à le faire (source : France Assos Santé, 2022). Même en cas d’incertitude, indiquez ce qui est connu, ce qui reste inconnu, et renvoyez vers des sources fiables.

Améliorer la confiance et l’engagement, les deux piliers d’une communication réussie

Trois facteurs font la différence auprès des patients associatifs :

  1. La clarté : Pas de jargon, pas de faux espoirs, de l’honnêteté sur ce que l’association peut (ou non) apporter.
  2. La personnalisation : Adapter l’information à la situation individuelle, reconnaitre les spécificités de chaque parcours.
  3. L’empathie : Chaque échange, même lorsqu’il est écrit en ligne, doit susciter un sentiment d’écoute et d’attention au vécu.

Selon la Fédération Française des Associations de Malades Chroniques (FFAMC), les associations qui investissent du temps dans la formation de leurs bénévoles à la communication voient la participation aux temps collectifs progresser de 40 % en un an.

Se former, se mutualiser et s’inspirer constamment

La communication avec les patients est une compétence qui se travaille et se renouvelle en permanence. Participer à des réseaux ou à des formations spécifiques (Santé Info Droits, France Assos Santé, Union nationale des associations familiales…) permet d’accéder à des ressources, des outils mutualisés, et de ne pas «réinventer la roue» à chaque fois.

  • Partagez vos supports et outils : Les banques d’outils collaboratifs (Doc’doc, Réseau FALC, plateformes de fiches pratiques) se multiplient et permettent un gain de temps considérable.
  • Osez solliciter l’expertise patient : Former des usagers pour relayer ou co-créer la communication garantit l’adéquation avec la réalité terrain.
  • Surveillez les innovations : Cartes interactives, WhatsApp pour l’accompagnement de proximité, modules d’e-learning… De petites innovations peuvent avoir de grands effets sur l’engagement des patients.

Aller plus loin : se remettre en question et évoluer avec ses publics

Communiquer efficacement avec les patients, dans le champ associatif, c’est accepter de toujours s’ajuster, tester, évaluer, et se remettre en question. Les retours reçus, les échecs, les « ratés » font progresser collectivement la qualité des échanges et des outils. C’est aussi oser s’inspirer d’autres secteurs : handicap, jeunesse, humanitaire.

Face aux nouveaux défis (inégalités d’accès à l’information, fake news santé, défi de la confiance), les associations santé ont toute légitimité pour innover et jouer un rôle moteur dans la diffusion de pratiques responsables et adaptées à la réalité des patients. Rendre la communication associative plus inclusive, plus participative, plus incarnée : voilà un levier concret pour favoriser l’autonomie, l’adhésion et la santé de tous.

Pour approfondir, des ressources utiles :

  • Fiches pratiques et guides de France Assos Santé : France Assos Santé
  • Boîte à outils "Facile à lire et à comprendre" : Unapei FALC
  • Étude "Communication et relations patients/associations" : CREDOC, 2022
  • Guides d’accessibilité numérique : RGAA - Numérique.gouv.fr

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